Last Days pour Albedo au BPS22

Hervé Charles est un photographe né en 1965 à Nivelles. Formé à l’image à l’INRACI, il développe dès les années 1990 une pratique photographique singulière, située à la croisée de l’art, de la science et de l’engagement environnemental.

Attirant d’abord l’attention avec ses clichés de nuages pris depuis les airs, il s’oriente progressivement vers des territoires marqués par la crise écologique : volcans, marées noires, incendies, pollutions industrielles… Son œuvre interroge la relation entre l’homme et les forces naturelles, tout en explorant les propriétés sensibles de la lumière, de la matière et du temps.

Travaillant sur différents supports — papier, verre, formats transparents — il combine esthétique exigeante et conscience écologique. Son travail a été exposé dans plusieurs institutions belges et européennes.

Du 7 juin au 31 août 2025, le Musée d’art de la Province de Hainaut nous propose de suivre son cheminement artistique au travers une juste sélection d’œuvres représentatives d’un travail incomparable qui explore l’environnement terrestre et ses nombreuses mutations.

Capter avec soin un impalpable éphémère

Clouds & Consequences est une série élaborée dans les années 1990, époque des premiers travaux photographiques d’Hervé Charles. Expérimentant l’exercice académique de la photographie des nuages, mais en embarquant sur un petit avion de tourisme, l’artiste est parvenu à pénétrer la substance immatérielle et nébuleuse qui tapisse nos cieux. Une approche intime qui a su capturer la fugacité de cette représentation instable. Aux cimaises du musée, ses fragments nuageux sur disques de verre, à l’image de tondi, se muent en archives d’un ciel torturé tout en reflétant la lumière qui traverse les sheds du BPS22.

Amener la couleur et la matière pour argumenter

Après les aspérités contrastées des nimbus volatiles, l’exposition bascule totalement dans la couleur. Hervé Charles s’étant tourné progressivement vers une écriture qui utilise un nuancier plus dense et saturé afin de dépeindre les transformations du milieu. Il nous invite à pénétrer des sites naturels qui se métamorphosent : paysages volcaniques, mers noires ou vertes, territoires boisés incendiés, etc

Car l’un des angles d’attaque privilégiés du photographe est celui des polluants dits « naturels », à savoir ces substances potentiellement nocives émises par la nature elle-même. Si à la base ils peuvent avoir des effets similaires à ceux des polluants d’origine humaine, ce qui les en distingue, c’est l’absence d’intervention directe de l’homme dans leur production. Mais très souvent, les activités des hommes viennent amplifier ou déclencher ces phénomènes. Et si Homo Sapiens n’est jamais le sujet central des images, ce sont bien ses agissements qu’elles dénoncent, en creux.

Un artiste visuel en perpétuelle exploration

Dans les salles, on découvre les cicatrices pourpres de l’Etna qui inflige ses brulantes attaques à la terre, mais aussi les sombres nuances de vagues polluées qui engloutissent tout sur leur passage, aiguillonnées par une forme de violence industrielle. Les prises de vues, frontales, vibrantes, dramatiques et paradoxalement très attractives, voire hypnotiques sont figées sur des supports d’une grande variété… C’est le paradoxe qui créé la sidération, au départ d’images chargées d’une grande beauté plastique, la brutalité des atteintes portées à l’environnement reste terrible. Le photographe parvient ainsi à sensibiliser l’opinion publique à une situation alarmante parce que ses prises de vue sont autant saisissantes qu’envoutantes. Ce sont des révélateurs de la force visuelle et émotionnelle des catastrophes écologiques qui défigurent les territoires abîmés.

Expérimentant les modes de révélations comme un autre moyen de renforcer la charge sensible portée par ses travaux, Hervé Charles invente de nouvelles manières de montrer l’image, avec des médias transparents comme le plexi par exemple qui deviennent eux-mêmes des nuances de paysages décalqués aux murs du musée. En mouvement, grâce à la photogrammétrie ou en relief, à l’aide de nouvelles technologies, ses recherches offrent une expérience visuelle en profondeur, une sorte de voyage halluciné entre rêve et post-vérité qui questionne notre rapport à la planète.

Offrir une expérience sensorielle et militante

Si l’exposition absorbe le regardeur, c’est sans aucune intention gratuitement sensationnaliste. Son dispositif protéiforme est d’avantage un prétexte à l’introspection. L’artiste photographie pour écrire avec la lumière. Il nous plonge dans les abîmes d’un récit, en se jouant de cette matière qu’il fabrique, réfléchit, interroge ».

L‘Albedo, blancheur en latin, ou deuxième phase du grand œuvre des alchimistes dans la transformation des métaux impurs en or, est la capacité d’une surface à réfléchir la lumière du soleil. Plus une surface est claire, plus son albédo est élevé et plus elle réfléchit la lumière. Inversement, une surface sombre absorbe plus de lumière et a un albédo plus faible. En termes simples, l’albédo est le « pouvoir réfléchissant » d’une surface. Ce phénomène joue un rôle crucial dans le climat terrestre : plus une surface réfléchit la lumière, moins elle emmagasine de chaleur. C’est pourquoi la fonte des glaces, qui réduit les zones à fort albédo, accélère le réchauffement climatique — un effet de boucle bien connu des climatologues.

Le titre Albedo syncrétise donc parfaitement les préoccupations d’Hervé Charles. C’est un indicateur éminemment important sur le plan environnemental, qui traduit un travail riche de préoccupations scientifiques, esthétiques et même politiques.

Mais que regarde-t-on ?

Adepte de la synecdoque, le photographe aime se jouer des échelles. En isolant des fragments pour évoquer le tout, il exige un effort d’attention et incline le spectateur à la concentration, voire à la méditation. Il nous faut en effet souvent nous poser un instant afin de pouvoir plonger totalement dans les images qu’Hervé Charles dépose sous nos regards. Après avoir réglé sa focale, l’œil qui a déchiffré certains indices peut alors entrer en résonnance avec les paysages restitués, pour en déceler l’étendue, la hauteur, l’urgence.

Peindre en photographiant

On l’a compris, Hervé Charles ne cherche pas simplement à capturer une image de la réalité. Il aime jouer avec les contrastes, les échelles, les reflets et les transparences, ce qui donne à son travail une profondeur, presque tactile qui renvoie aux sensations qu’offre l’art de la peinture. De même, ses cadrages proposent de véritables compositions qu’on peut presque comparer à des tableaux traditionnellement équilibrés en termes de masses ou de perspectives.

Les tonalités de ses photos en couleur sont, elles aussi, d’une grande intensité qui vient renforcer la charge dramatique de sa narration, à la manière des peintures expressionnistes.

Quelques activités encore

Dernier premier dimanche

Ne manquez donc pas l’opportunité de bénéficier d’une visite guidée à prix libre ce dimanche 3 août. L’accès au musée est gratuit en ce premier dimanche du mois ! Le prix libre est un tarif dit libre et solidaire. Il permet aux visiteurs et visiteuses de fixer le prix de la visite guidée en fonction de leur situation financière. Un prix médian recommandé de 5 € est proposé. Ceux qui paient un peu plus permettent à d’autres de payer un peu moins, voire ne rien payer du tout.

Un stage pour les 8-12 ans : création naturelle

Pour ce stage connecté à l’exposition Albedo d’Hervé Charles et aux quatre éléments du Petit musée, la représen­ta­tion de la nature et l’utilisation de matières naturelles seront au cœur des pratiques artistiques proposées.

Ce stage sera, par exemple, l’occasion de découvrir des techniques originales comme le tissage ou la vannerie réalisées grâce à des matériaux comme de la corde, du rafia ou des branches. Et comme la créativité et la nature se combinent parfois là où on ne l’attend pas, plantes, fleurs et fruits seront intégrés à la pratique de diverses techniques d’impression, de moulage et d’assemblage. Il reste encore quelques places !

Avec Mario Lancini et Alice Mathieu, médiateur et médiatrice au BPS22.

Ultime jour de visite : le 30.08

Pour le dernier jour de présen­ta­tion de l’exposition Albedo, une toute dernière occasion de la découvrir en compagnie de l’équipe du musée !

14:00 > 17:30 : Visite libre avec présence en salles des guides du BPS22 et de l’artiste Hervé Charles entre 14:00 et 17:30

15:00 : Visite guidée par Pierre-Olivier Rollin, directeur du BPS22, à 15:00 (sur réservation !)

Informations pratiques

Exposition du 7 juin – 31 août 2025.

BPS22, Boulevard Solvay, 22 – 6000 Charleroi.

Horaires : mardi–dimanche, de 10h à 18h. Fermé le lundi.

Prix : 6 € (adulte), réductions pour seniors, étudiants, etc. Gratuit pour les < 12 ans

www.bps22.be

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Et puis une petite pépite, un podcast France Culture du Professeur Rollin (par le comédien François Rollin) consacré au mot Albédo 

 

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