Le 14 novembre 2020, Jacques Liébin nous laissait orphelins.
Figure emblématique de la communauté scientifique de la région du Centre, ce grand pédagogue, aura durant toute sa vie fait preuve d’un exemplaire acharnement en vue de sauvegarder, animer et valoriser les témoignages constituant les racines de bon nombre d’entre nous.
Né à l’aube de la seconde guerre mondiale, sans doute profondément marqué par l’exil de ses parents et par les atrocités liées à cette période de l’histoire de l’Humanité, Jacques Liébin aura durant tout son parcours de vie été un éducateur populaire, profondément humaniste.
Auteur d’un nombre remarquable de publications et contributions consacrées à l’histoire du bassin économique qui l’a vu naître, ce professeur d’Athénée, est aujourd’hui reconnu comme l’un des pionniers en Belgique en matière d’archéologie industrielle. De manière précoce, il a perçu la grande nécessité de sauver de l’oubli les traces fragiles et jugées sans intérêt du formidable développement qu’ont connu le territoire louviérois et sa périphérie.
Témoin des grandes grèves de 60 et des fermetures d’usines qui ont secoué son environnement, Jacques Liébin, animé par le souci de préserver les outils, les gestes et les récits de cette tranche chronologique a sans doute dû paraître un peu « farfelu » pour ses contemporains qui préféraient alors mettre en oeuvre une politique facile de la « tabula rasa« .
« On peut s’appuyer sur le passé pour comprendre et forger un avenir » Jacques Liébin
C’est à son dévouement et son acharnement que l’on doit la conservation dans son ensemble du site minier du Bois-du-Luc, inscrit depuis 10 ans maintenant sur la Liste du Patrimoine Mondial de l’UNESCO. Un cycle d’événements sera d’ailleurs bientôt inauguré sur le site minier pour commémorer ce classement. Ce site exceptionnel de par son intégrité et son authenticité était voué à disparaître quelques années après la fermeture de la fosse du Quesnoy, lorsque Jacques Liébin constitua un dossier et un argumentaire en faveur de sa préservation dès le milieu des années 70. Aujourd’hui Bois-du-Luc accueille le Musée de la Mine et du Développement durable et après avoir connu plusieurs phases de travaux de restauration, va bénéficier de moyens à la hauteur de son importance grâce au combat mené par ses instances.
Armé de sa ténacité et de son savoir, il a agi en menant un travail de sensibilisation, parvenant parfois à sauver de la destruction, des machines, des usines, des archives sur tout le territoire du Centre. Enfreignant parfois les règles, il lui est souvent arrivé de se rendre dans des espaces usiniers à l’abandon pour extraire de l’oubli des documents qui se révèlent aujourd’hui pour les chercheurs, extrêmement précieux. Non content d’avoir pu obtenir le maintien du site du Bois-du-Luc, Jacques Liébin en a fait un des plus riches lieux de conservation d’archives industrielles du territoire wallon. Aujourd’hui le SAICOM et le MMDD gèrent ensemble de nombreux fonds, dans le sillage de son action.
Jamais à court d’idées et soucieux de concrétiser ses projets à visées scientifiques, culturelles et sociales, il laisse aujourd’hui un héritage inestimable aux générations futures. Il a dû souvent lever le poing et se sentir bien seul dans cet incroyable combat de toute une vie. Mais outre le soutien indéfectible de son épouse Josette, il a aussi pu compter sur Michel Host, son ami historien et complice pour poursuivre sa quête face aux moulins brassant l’ignorance.
(c) EdA
C’est Michel, fidèle et facétieux comparse des bons et moins bons moments qui évoquera avec nous ce grand homme, son investissement,
son humour, son parcours. Un moment qui promet d’être émouvant et drôle à la fois, riche des anecdotes que nous livrera celui qui continue d’animer les ateliers initiés avec Jacques Liébin, il y a longtemps déjà…
Hainaut Culture est heureux que cet hommage lui soit rendu au Gazomètre, car Jacques et Michel entretiennent une vraie filiation avec les créateurs de la Commission provinciale des Loisirs de l’Ouvrier qu’ils ont tant étudiée, convaincus eux aussi que le Savoir et la Beauté sont vecteurs d’émancipation et d’élévation pour tous. Ils sont les dignes héritiers de Parent, Pastur et Destrée.
Mardi 7 juin à 19h, Le Gazomètre.
Réservation obligatoire
au 064/312 508
Pour en savoir plus sur Bois-du-Luc et son Programme 2022.
Photo illustrant l’événement : (c) Alexis Taminiaux
